mardi 17 août 2021

Poésie : Le Barbichet (Jean Rebier)

 






Le Barbichet



Je le confesse, en vérité,
Sur mon âme,  je suis tenté
De croire qu'au vieux temps les fées,
Dispensatrices de beauté,
Du barbichet étaient coiffées.



Oui, c'était leur main qui filait
Le lin pur et blanc comme lait,
Puis en guise de broderie,
Sur la trame fine elle ourlait,
Toutes les fleurs de la prairie.

Car cet atour si gracieux,
Qui captive et charme les yeux,
Ne peut avoir d'autre origine
Et nous vint tout exprès des cieux,
Pour embellir la Limousine.

Rien ne saurait faire valoir
Comme lui l'éclat de l'oeil noir
Et le vif incarnat des lèvres,
Ni sur les fronts faire pleuvoir
Un tel essaim de grâces mièvres.

Son extrême fragilité,
Sa coquette mobilité,
Sitôt que la brise l'éveille,
Lui font une espiègle beauté,
A la vôtre toute pareille.

Et lorsqu'au moindre coup de vent
Ses ailes frôlent en tremblant
Un minois jeune et point morose,
On dirait un papillon blanc
Qui courtise un bouton de rose.

Vous l'avez banni sans pitié,
Mais j'ai peur qu'il ait emporté,
O Limousines infidèles,
La grâce de votre beauté
Dans les replis de ses dentelles.


Jean Rebier



(source poésie : Gallica/BNF)


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